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Galerie L'oeil en relief
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9 février 2011

Epreuve

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L'épreuve

Nous avons observé hier, l'intérieure d'une rue. Disons que nous nous sommes arrêtés à une place centrale, abritée de deux ou trois colonnes. La fraîcheur du lieu nous a attirée et le silence nous a pris. Merkim était assis là, jouant tantôt avec son mobile phone, tantôt à appeler on ne sait qui ou quoi. Merkim, c'est le monsieur vêtu de blanc qui habite la maison d'à côté. Son fils, Hermed, joue sur le balcon du haut, à faire tomber les serviettes et les tissus en bas. Sa mère Houjda, réceptionne le tout en poursuivant sa conversation avec son amie, Malbelda. C'est une des voisines du quartier. Un homme du gouvernement sans doute, s'adresse aux habitants d'ici, comme s'il vendait des calendriers. Merkam a ouvert sa porte en hésitant sur quelque chose. Je n'ai pas tout compris et mon regard change de direction. Les filles de la maison voisine assurent un va et vient que je tente de capter sans succès. La grand-mère a elle aussi la main collée à son oreille. L'essentiel se trouve dans notre silence et ce regard porté sur ces êtres inconnus. Merkim, Hermed, Houjda et Malbelda, pourquoi pas Douti, Jawa ou Lali ?

Je ne sais comment écrire réellement son nom, c'est pourquoi je n'écorcherais pas plus cette personne qui a perdue pas mal de force déjà durant ces deux dernières semaines. Nous avons rencontré cette jeune fille parisienne, sur la route de Bikaner, dans un fast-food indien, servant des parathas masala à me rendre heureux et gourmand. Nous l'avons accueillie à notre table pendant que Noor faisait connaissance avec son chauffeur.

Elle nous raconte ce qu'elle vit. Nous écoutons, nous entendons. La vérité est difficile à dire mais elle doit savoir. Elle se met à pleurer. Ma compagne a de nouveau le ventre qui se tord. Son émotion la traverse. Elle continue, et nous répliquons par ce que l'on sait, en évitant de dire ce qu'elle aurait du faire. Une autre réalité prend forme en elle, mais elle est douloureuse. Lorsqu'elle est découverte, l'ignorance crée souvent une réaction chimique dans l'esprit, pour se manifester ensuite dans le corps. L'acceptation est difficile mais sa douceur l'aide dans cette voie. L'écoute se poursuit. Nous échangeons ce que nous savons de ce pays en essayant de la rassurer.

L'inde est vraiment une terre à part. L'expérience de cette jolie personne nous le rappelle, et son tranchant ne fait aucun cadeau. Les anciens de la route 70 nous l'ont assurément rappelés maintes fois, en dodelinant de la tête et signifiant un épuisement encore suicidaire. Mais à chaque fois nous en revenons au fait que ce magma existenciel soit si attachant. Pourquoi ? Parce que l'on se sent vivant et que la vie grouille. Les choses ne se passent jamais comme prévues. L'esprit ne peut se cantonner à ses routines de fortune. Le présent est remis en question en permanence et l'on ne peut présumer de quoique ce soit. C'est pourquoi, il nous met dans l'attention et aiguise une vigilance sans pareil. Si l'on ne veut pas sombrer, il nous faut avoir un tempérament de guerrier. Le remerciement à ce pays est lié essentiellement à la découverte de soi. Sinon, on passe à côté de précieuses rencontres et le voyage aura ainsi été vain.

Ma compagne nous laisse un instant. J'essaie de lui dire que nous nous trouvons toujours sur la bonne voie, et cependant ce qui nous fait souvent défaut, vient de notre façon de percevoir le monde, de ramener toutes choses à soi. Même si les situations nous sont douloureuses et nous laissent dans le désarroi, elles nous permettent aussi d'en transformer les causes et les conséquences par le simple fait d'accepter et d'en garder l'ouverture. On ne peut nier le moindre détail. L'effort est considérable mais il permet de reconsidérer l'énergie que l'on déploie au sein du monde. Puisqu'il nous faut voir réellement, alors commençons par observer ce qui en soi nous a poussés à être aussi naïf !

Cela commence par ces gens de la rue et du quartier que l'on ne connaît pas, et qui habituellement, sont les premiers spectateurs de nos disgrâces. En se posant sur ses fesses, parmi la foule, même si l'invitation n'est pas déclarée, elle est de toute façon la bienvenue. S'arrêter offre la possibilité de s'ouvrir à l'espace et à l'activité, à s'imprégner des gestes, des attitudes et des regards.

L'épreuve de cette jeune fille, lui donne la possibilité de manifester un immense courage. Son chemin fait écho à tout ! Car sa gentillesse à elle est universelle.

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